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Droit des cartels: le Conseil fédéral reconnaît la nécessité de réformer les institutions

L'essentiel en bref:

  • Le Conseil fédéral a ouvert la consultation en vue d’une réforme des institutions impliquées dans le droit des cartels
  • Il reconnaît des faiblesses actuelles – mais reste trop mesuré dans ses propositions
  • Des procédures équitables et efficaces nécessitent des compétences claires, une séparation fonctionnelle des rôles et des instances décisionnelles spécialisées​

​​Le Conseil fédéral a lancé la consultation en vue d’une réforme institutionnelle des autorités de la concurrence. Il confirme ainsi officiellement une critique récurrente des milieux politiques, scientifiques et économiques: la structure actuelle de la Commission de la concurrence (COMCO) présente des lacunes fondamentales. Dès lors, il est juste d’enfin préparer une réforme. Mais si on peut se réjouir de voir la nécessité de prendre des mesures reconnue, le projet reste cependant trop timide. Les propositions vont certes dans la bonne direction, mais on déplore l’absence d’une réorientation structurelle stricte du côté de la surveillance de la concurrence.

Renforcer les normes fondées sur l’État de droit​

Les procédures relevant du droit des cartels peuvent être lourdes de conséquences: amendes se chiffrant en millions, procédures qui s’éternisent et dommages réputationnels – et ce avant même qu’un jugement définitif ne soit rendu. Il est donc d’autant plus important que la structure des procédures satisfasse des normes de l’État de droit. À l’heure actuelle, l’instruction, l’accusation et la décision ne sont pas séparées sur le plan institutionnel. Le secrétariat de la COMCO ne se contente pas de diriger les procédures, il prépare également les décisions et exerce ainsi une influence décisive sur l’issue des procédures. La commission elle-même, dont la plupart des membres travaillent à temps partiel, est fortement tributaire des préparatifs du secrétariat.

Le Conseil fédéral reconnaît des dysfonctionnements – mais mise sur des corrections minimales

​Les propositions du Conseil fédéral vont dans la bonne direction: la séparation formelle des rôles, la participation anticipée des parties et des améliorations ponctuelles dans la procédure de recours sont autant de progrès. Cependant la structure de la procédure reste fondamentalement inchangée – et avec elle le risque de distorsions institutionnelles. Aux yeux d’economiesuisse, c’est un peu court. La procédure doit parfaitement respecter les principes de l’État de droit, être compréhensible et proportionnée. Pour cela, il faut une séparation fonctionnelle claire des rôles dans la procédure. C’est le seul moyen de garantir une surveillance de la concurrence équitable, efficace et tenant compte des besoins de l’économie.

Le Parlement demande lui aussi des réformes

​En acceptant la motion 23.3224, début juin, le Parlement a clairement indiqué qu’il fallait une réforme structurelle exhaustive et pas seulement des ajustements cosmétiques. La motion demande une «séparation fonctionnelle» entre l’accusation et la décision ainsi qu’une révision en profondeur des compétences et des règles de procédure. Le Conseil fédéral se saisit de la question – mais n'a toutefois pas le courage nécessaire pour corriger le système.

economiesuisse participe au débat de manière constructive

L’économie salue le fait que le Conseil fédéral reconnaisse la nécessité de réformer la procédure relevant du droit des cartels. Il est désormais décisif d’aller au-delà de quelques ajustements ponctuels et cosmétiques. Ce qu’il faut, c’est une procédure cohérente avec une séparation nette entre l’enquête, l’accusation et la décision, des droits de défense efficaces et des procédures accélérées. economiesuisse s’engage fermement en faveur d’un modèle pragmatique: avec la COMCO comme autorité d’accusation et un tribunal spécialisé en matière de concurrence comme instance décisionnelle.

La consultation en vue d’une réforme des institutions qui vient d’être lancée ne doit pas être considérée isolément. Elle est étroitement liée aux adaptations matérielles de la loi sur les cartels débattues en ce moment au Parlement. Les deux réformes sont conditionnées l’une à l’autre: une surveillance de la concurrence modernisée ne peut déployer ses effets que si les fondements institutionnels sont satisfaisants – et inversement. En ce qui concerne la réforme matérielle, le Conseil national a présenté un compromis équilibré et fait ainsi un pas constructif en direction du Conseil des États.

Nous participerons donc à la consultation avec des propositions concrètes et dans un esprit constructif – pour une surveillance de la concurrence équitable, efficace et tournée vers l’avenir.