Klima Forscher

​​Conventions d’objectifs: un modèle de réussite à l’avenir incertain

L'essentiel en bref: 

  • Depuis 2013, l’industrie suisse a réduit ses émissions de CO2 de plus de 1,2 million de tonnes grâce à des conventions d’objectifs facultatives. C’est plus que les émissions annuelles de tous les ménages zurichois
  • Les conventions d’objectifs promeuvent la mise en place de mesures pour accroître l’efficience et d’innovations technologiques – sauf qu’un durcissement des prescriptions place les entreprises à forte intensité énergétique et celles qui ont déjà conclu des conventions face à de nouveaux défis
  • Seules des règles simples et pragmatiques permettront de maintenir l’attractivité du modèle et d’atteindre l’objectif zéro émission nette

​​En 2024, l’industrie suisse a réduit ses émissions de CO2 de 67 000 tonnes supplémentaires, un résultat en hausse nette plus élevé que prévu. Par rapport à 2013, les entreprises suisses ont réduit leurs émissions de CO2 de plus de 857 000 tonnes au total. Elles ne sont pas contentées d’atteindre leurs objectifs, elles les ont nettement dépassés: dans l’ensemble, elles ont dépassé l’objectif de 11,5 points par rapport à la trajectoire convenue avec la Confédération. Selon l’Inventaire des gaz à effet de serre de la Confédération, l’industrie est le seul secteur à avoir systématiquement atteint ou dépassé ses objectifs climatiques. L’industrie suisse émet actuellement deux fois moins de CO2 qu’en 1990, tout en doublant sa valeur ajoutée brute

​Les conventions d’objectifs fonctionnent et l’environnement en profite

Les conventions d’objectifs sont un instrument de protection du climat facultatif qui a fait ses preuves: les entreprises s’engagent envers la Confédération à réduire leurs émissions de CO2 par des mesures pouvant être mise en œuvre de manière rentable. Celles-ci vont de l’accroissement de l’efficacité dans la production à la conversion aux énergies renouvelables, en passant par des investissements dans des technologies climatiquement neutres. En contrepartie, les entreprises obtiennent le remboursement de la taxe CO2 prélevée sur les combustibles, pour autant qu’elles atteignent leurs objectifs. Si ce remboursement ne couvre qu’une partie des investissements, les entreprises réduisent aussi en permanence leur facture énergétique puisqu’elles accroissent leur efficacité énergétique.

​C’est une solution gagnant-gagnant: les émissions sont réduites là où cela est le plus efficient. En même temps, on garantit des emplois et on renforce le site de production suisse. L’environnement en profite aussi, puisque les conventions d’objectifs permettent de réduire les émissions de CO2.

​De nouvelles prescriptions remettent en question le modèle

​Des efforts considérables seront nécessaires ces prochaines années pour que la Suisse puisse atteindre l’objectif zéro émission nette. Or les conventions d'objectifs ont fait leurs preuves et incitent les entreprises à prendre des mesures de protection du climat facultatives. Le nombre d’entreprises participantes baisse toutefois légèrement pour la première fois: fin 2024, 4715 entreprises participaient à l’Agence de l’énergie pour l’économie (AEnEC) – c’est 41 de moins qu’en 2023. Cette baisse s’explique principalement par des changements structurels tels que des fermetures ou des fusions.

Les prescriptions se sont durcies en janvier 2025, avec l'entrée en vigueur de la révision de l’ordonnance sur le CO2: les entreprises doivent désormais réduire leurs émissions de 2,5% par an. Les critères relatifs aux mesures économiquement rentables ont aussi été adaptés. Il en résulte des défis supplémentaires pour les entreprises à forte intensité énergétique ou celles dont le degré d’efficacité est déjà élevé. Sans compter qu’il est absurde, sous l’angle de la politique climatique, que des entreprises ayant commencé tôt à prendre des mesures il y a longtemps doivent suivre la même trajectoire de réduction que des participants plus récents. Les durcissements ne sont pas praticables et auront pour conséquence que certaines entreprises ne concluront plus de convention d'objectifs et réduiront moins leurs émissions de CO2. Aussi est-il décisif pour la protection du climat que les conventions d’objectifs restent attractives.

Poser les bons jalons pour atteindre les objectifs climatiques

Afin que les succès remportés en matière de réduction des émissions se poursuivent, il faut des conditions-cadre tournées vers l’avenir. Car le chemin vers l’objectif zéro émission nette d’ici à 2050 est exigeant et ne peut être emprunté qu’avec le concours de l’économie. Les conventions d’objectifs ont montré comment il est possible d'atteindre l’objectif: elles associent des réductions effectives des émissions avec des avantages en termes de compétitivité et de qualité de la place économique. Elles incitent à innover, encouragent les investissements dans des technologies modernes et sensibilisent les entreprises à la protection du climat et à la responsabilité individuelle.

​La complexité administrative ne doit pas étouffer une protection du climat ambitieuse. Au lieu de multiplier les prescriptions détaillées, il faut des règles claires, simples et pratiques – notamment pour les PME. C'est ainsi seulement que le système restera attractif pour les entreprises et efficace sous l’angle climatique. La Suisse peut jouer un rôle de pionnier en matière de protection du climat si elle parvient à concilier réduction des émissions et activité économique. Sinon, son exemplarité à l’échelle internationale deviendra rapidement dissuasive.