Face aux chocs du monde, l’ou­ver­ture est notre seul atout

L'es­sen­tiel en bref:

  • Dans un monde où les droits de douane se mul­ti­plient et les ten­sions géo­po­li­tiques s’ag­gravent, la ten­ta­tion du repli gagne du ter­rain
  • Les réper­cus­sions éco­no­miques seraient immé­diates
  • L’ou­ver­ture n’est pas un luxe, mais notre meilleure assu­rance face aux chocs

Ormuz sous ten­sion, les mar­chés en alerte. Dans un monde où un détroit peut deve­nir une arme, où les droits de douane se mul­ti­plient et les ten­sions géo­po­li­tiques s’ag­gravent, la ten­ta­tion du repli gagne du ter­rain. Les réper­cus­sions éco­no­miques sont immé­diates: incer­ti­tude, chaînes d’ap­pro­vi­sion­ne­ment fra­gi­li­sées, envo­lée des coûts logis­tiques, des matières pre­mières et de l’éner­gie, frag­men­ta­tion des mar­chés. Quand deux francs sur cinq sont géné­rés par nos expor­ta­tions, se refer­mer n’est pas une option. Autant dire que l’ou­ver­ture n’est pas un luxe, mais notre meilleure assu­rance face aux chocs.

C’est la stra­té­gie que pour­suit la Suisse. Der­nier exemple en date: la signa­ture lundi à Tromsø d’un accord de libre-échange avec la Malai­sie. Ce texte ouvre l’ac­cès à un mar­ché stra­té­gique d’Asie du Sud-Est, avec – pour la pre­mière fois – un accord AELE d’ac­cès réci­proque aux mar­chés publics dans la région. Il pré­voit aussi des enga­ge­ments ambi­tieux en matière de dura­bi­lité, et des débou­chés dans les tech­no­lo­gies d’ave­nir, comme les semi-conduc­teurs. Il s’ajoute à l’ac­cord adopté avec l’Inde, à la moder­ni­sa­tion de l’ac­cord de libre-échange avec le Chili (approu­vée au Conseil des États), ou encore aux accords conclus avec la Thaï­lande et le Kosovo. Quant à l’ac­cord AELE-Mer­co­sur, en phase de fina­li­sa­tion, il sup­pri­me­rait 95% des droits de douane sur nos expor­ta­tions, pour un gain estimé à 180 mil­lions de francs par an.

Autre avan­cée mécon­nue: l’ac­cord signé avec le Royaume-Uni sur les ser­vices finan­ciers. Ce texte inédit ouvre la voie à un com­merce plus fluide entre les deux pays dans des domaines comme la banque, l’as­su­rance ou la ges­tion d’ac­tifs. Plu­tôt que d’im­po­ser les mêmes règles, les deux pays recon­naissent que leurs sys­tèmes abou­tissent à des résul­tats com­pa­rables – une approche inédite entre grandes places finan­cières euro­péennes.

Mais ces efforts vers le reste du monde ne sau­raient com­pen­ser l’en­jeu de sta­bi­li­ser et de conso­li­der la voie bila­té­rale avec notre prin­ci­pal par­te­naire: l’Union euro­péenne. Plus de 50% de nos expor­ta­tions y sont des­ti­nées. Et l’en­jeu dépasse les seules entre­prises tour­nées vers l’in­ter­na­tio­nal. La dyna­mique des expor­ta­tions irrigue tout notre tissu éco­no­mique: four­nis­seurs, arti­sans, ser­vices, com­merces. De la start-up à la mul­ti­na­tio­nale, du bou­lan­ger au bureau d’in­gé­nieur, c’est toute l’éco­no­mie suisse qui est concer­née.

C’est dans ce contexte que s’ouvre une séquence déci­sive. Depuis le 13 juin, la consul­ta­tion sur le nou­veau paquet d’ac­cords, les Bila­té­rales III, est ouverte. Tous les textes sont désor­mais sur la table. Place aux faits. Il est temps d’abor­der ce débat avec rigueur, loin des cari­ca­tures. eco­no­mie­suisse va mener une ana­lyse appro­fon­die, en y asso­ciant tous ses membres.

Mais au-delà de tous ces textes et accords, c’est aussi une cer­taine idée de la Suisse qui est en jeu. Un pays ouvert, connecté, capable de faire face aux chocs sans se replier. Dans un monde instable, ce sont les ponts – pas les murs – qui garan­ti­ront, demain comme aujour­d’hui, notre liberté d’ac­tion, notre bien-être et notre sécu­rité éco­no­mique.

Cet article a paru dans l'Agefi le 24 juin 2025.